La Littérature Du 17ème Siècle, période faste de l’histoire intellectuelle française, se révèle être un miroir fascinant des aspirations, des tourments et des gloires d’une époque charnière. C’est en son sein que se forge l’idéal classique, une quête d’ordre, de raison et de perfection formelle qui va profondément marquer l’identité culturelle de la France. Au-delà des splendeurs de la Cour du Roi-Soleil, cette période est un laboratoire où se sont distillées les plus pures expressions du génie littéraire, un âge d’or qui continue de résonner dans nos sensibilités contemporaines. En tant que conservateur de cette mémoire vive pour “Pour l’amour de la France”, je vous invite à une exploration éclairée de ce patrimoine inestimable, à en saisir les nuances et la profondeur intemporelle.
Aux Racines du Grand Siècle : Un Contexte Historique et Philosophique
Pour appréhender pleinement la magnificence de la littérature du 17ème siècle, il est impératif d’en sonder les fondations historiques et philosophiques. Cette période est indissociable du règne de Louis XIV, le Roi-Soleil, dont l’absolutisme monarchique façonne une société hiérarchisée, centralisée et avide de gloire. La Cour de Versailles devient le centre névralgique du pouvoir, de l’art et des mœurs, imposant ses codes et son esthétique. Parallèlement, le paysage intellectuel est bouleversé par la pensée de René Descartes, dont la fameuse formule “Je pense, donc je suis” érige la raison en principe suprême, incitant à une quête de clarté, de distinction et d’ordre dans tous les domaines, y compris l’expression littéraire. Le jansénisme, avec sa vision rigoriste de la condition humaine et de la grâce divine, apporte une dimension d’angoisse existentielle et de profondeur morale qui irrigue de nombreuses œuvres. Cet alliage de pouvoir, de raison et de spiritualité crée un terreau fertile pour une floraison artistique sans précédent. Pour ceux qui souhaitent approfondir cette immersion, la richesse de la littérature française du 17ème siècle offre des perspectives inestimables sur cette époque.
Qu’est-ce qui caractérise le Classicisme en littérature ?
Le Classicisme, mouvement esthétique dominant de la littérature du 17ème siècle, se distingue par son idéal de perfection, de mesure et de clarté. Il vise à atteindre l’universel à travers le particulier, en s’appuyant sur l’imitation des Anciens et les règles strictes de l’art, cherchant à instruire et à plaire. L’émotion y est maîtrisée par la raison, et la forme est polie à l’extrême pour atteindre une harmonie et une élégance qui sont la signature de ce “Grand Siècle”. Les auteurs classiques s’efforcent d’observer la nature humaine avec lucidité et de la représenter avec une vérité psychologique, tout en respectant les conventions de la bienséance et de la vraisemblance. C’est une littérature d’équilibre, de symétrie, où chaque mot est pesé et où la clarté de l’expression est primordiale pour toucher un public cultivé et exigeant.
Les Grands Thèmes de la Littérature du 17ème Siècle
La diversité thématique de la littérature du 17ème siècle, malgré l’uniformité apparente de son idéal esthétique, est étonnante. Elle plonge au cœur de l’homme, de ses passions, de ses illusions et de sa quête de sens.
L’Exploration de la Nature Humaine : Passions et Raison
Au centre des préoccupations des écrivains de cette époque se trouve l’étude de l’homme, déchiré entre ses passions dévorantes et l’impératif de la raison. Tragédiens comme Corneille et Racine dépeignent des héros confrontés à des dilemmes moraux insolubles, où l’amour, l’honneur et le devoir s’affrontent avec une intensité dramatique rare. Chez Pascal, les Pensées révèlent la misère de l’homme sans Dieu, mais aussi sa grandeur par la pensée, soulignant la fragilité de notre condition et la puissance de notre esprit. La Rochefoucauld, avec ses Maximes, expose les ressorts égoïstes de nos actions, même les plus vertueuses, offrant une vision parfois cynique mais toujours pénétrante de l’âme humaine.
La Critique Sociale et la Satire Morale
Si le Grand Siècle célèbre la monarchie et l’ordre, il n’en est pas moins un ardent critique des travers de la société. Molière, maître incontesté de la comédie, dresse des galeries de portraits impayables, fustigeant l’hypocrisie, la prétention, la pédanterie et l’avarice. Ses pièces, comme Le Bourgeois Gentilhomme ou L’Avare, sont des miroirs tendus à une société où les apparences comptent plus que l’être. Jean de La Fontaine, à travers ses Fables, utilise les animaux pour mieux dénoncer les vices et les ridicules des hommes, offrant une leçon de sagesse intemporelle et une critique subtile des puissants. Ces œuvres, loin d’être de simples divertissements, sont des instruments d’observation sociale d’une acuité remarquable.
La Quête Spirituelle et l’Angoisse Existentielle
L’influence du jansénisme, malgré sa condamnation, est palpable dans la littérature du 17ème siècle. Elle introduit une dimension de gravité et de questionnement sur le salut, la grâce et le libre arbitre. Blaise Pascal en est l’incarnation la plus éclatante, ses Pensées étant une méditation profonde sur la condition humaine face à l’infini, la foi et la raison. Cette angoisse existentielle, cette conscience de la fragilité de l’homme et de sa petitesse face à l’immensité de l’univers et aux mystères de Dieu, confère à certaines œuvres une gravité et une profondeur rares.
Chefs-d’œuvre et Figures Incontournables de cette Époque
Le 17ème siècle est un panthéon d’auteurs dont les noms brillent encore de mille feux et dont les œuvres constituent des piliers de notre culture.
Le Théâtre Classique : Tragédie et Comédie
Le théâtre est sans doute le genre roi de cette époque, élevé à son apogée par les géants que sont Corneille, Racine et Molière.
La Tragédie :
- Pierre Corneille célèbre le héros doté d’une volonté inébranlable, confronté à des dilemmes entre l’amour et l’honneur, le devoir et la passion. Des pièces comme Le Cid, Horace ou Cinna sont des hymnes à la grandeur d’âme et à la force morale. Ses personnages, souvent des figures historiques ou mythologiques, sont des incarnations de vertus et de conflits héroïques.
- Jean Racine, son successeur, s’attache à l’étude des passions destructrices. Ses tragédies, Phèdre, Andromaque ou Britannicus, plongent au cœur des âmes torturées par un amour fatal, la jalousie ou l’ambition, souvent sous l’égide d’une fatalité antique. La psychologie de ses personnages est d’une finesse incomparable, et son style d’une pureté et d’une musicalité exceptionnelles.
La Comédie :
- Molière (Jean-Baptiste Poquelin) est le dramaturge comique par excellence. Ses pièces, allant du burlesque à la satire la plus féroce, dénoncent les vices universels et les ridicules sociaux. Le Misanthrope, L’Avare, Les Femmes savantes, Le Malade imaginaire sont autant de chefs-d’œuvre où l’observation des mœurs est alliée à une construction dramatique ingénieuse et un dialogue étincelant. Comme le souligne le Professeur Jean-Luc Dubois, spécialiste émérite de la dramaturgie classique, “Le théâtre du XVIIe siècle n’est pas seulement un divertissement, c’est une arène où se joue le destin de l’homme face à ses passions et à la société, sous l’œil exigeant de la raison.”
La Prose Réflexive et Moralisante
La prose du 17ème siècle est marquée par une recherche d’élégance et de profondeur, souvent au service de la réflexion morale et philosophique.
- Blaise Pascal, génie mathématique et philosophe, offre avec ses Pensées une méditation fragmentée mais bouleversante sur la condition humaine, la foi et la quête de Dieu. Son style est d’une puissance et d’une concision admirables.
- François de La Rochefoucauld condense dans ses Maximes une vision acérée et parfois désenchantée de l’homme, dévoilant l’amour-propre comme le principal moteur de toutes nos actions.
- Madame de Sévigné, à travers ses lettres à sa fille, brosse un tableau vivant et intime de la Cour et de la société de son temps. Ses écrits sont des joyaux d’élégance, de spontanéité et de perspicacité.
- Madame de La Fayette révolutionne le roman avec La Princesse de Clèves, un chef-d’œuvre de l’analyse psychologique. Elle explore avec une délicatesse et une profondeur inédites les tourments intérieurs d’une femme déchirée entre son devoir et une passion interdite, posant les bases du roman psychologique moderne.
La Poésie et les Essais
Si le théâtre et la prose morale dominent, la poésie trouve également son expression dans le cadre classique. Nicolas Boileau, avec son Art poétique, codifie les règles du bien écrire, du bon goût et de la bienséance, devenant le législateur du Parnasse classique. Ses préceptes, bien que parfois décriés, ont contribué à structurer l’esthétique littéraire de l’époque.
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Quelles Techniques Littéraires ont Défini le Style Classique ?
La littérature du 17ème siècle a façonné un style caractérisé par la clarté, la concision et la recherche de l’harmonie. Les auteurs privilégiaient un langage pur, une syntaxe ordonnée, l’usage de la rhétorique pour persuader et émouvoir, ainsi que des figures de style telles que l’alexandrin en poésie et au théâtre, et la périphrase pour la bienséance. Le style classique est avant tout un style de la mesure, de la retenue, où l’émotion est sublimée par une expression rigoureuse. C’est un art de la suggestion plutôt que de la démonstration explicite, laissant une grande place à l’intelligence et à l’imagination du lecteur. Les principes de bienséance (éviter ce qui pourrait choquer) et de vraisemblance (représenter ce qui est crédible) sont des piliers de cette esthétique, guidant les choix narratifs et stylistiques. L’équilibre et la symétrie des phrases, la recherche du mot juste et la musicalité de la langue sont autant de caractéristiques qui font la beauté intemporelle de cette écriture. La maîtrise de ces techniques est ce qui confère à la litterature francaise 17e siecle sa réputation d’élégance et de perfection.
Influence et Postérité de la Littérature Classique Française
L’impact de la littérature du 17ème siècle ne se limite pas à son époque; il s’étend et se répercute à travers les siècles, façonnant durablement la pensée et l’expression artistique.
L’Héritage pour les Siècles Suivants
Les chefs-d’œuvre du Grand Siècle ont jeté les bases d’une tradition littéraire française d’excellence. Le 18ème siècle, celui des Lumières, tout en s’émancipant de certaines contraintes classiques, s’est construit en dialogue constant avec cet héritage. Les philosophes comme Voltaire ou Diderot ont admiré la clarté et la force rhétorique des classiques, même s’ils ont critiqué leur vision du monde. Le théâtre de Marivaux ou de Beaumarchais, tout en évoluant, puise dans l’analyse psychologique raffinée initiée par Racine ou Madame de La Fayette.
Plus tard, le Romantisme du 19ème siècle s’est souvent défini en réaction contre le Classicisme, cherchant à briser les règles et à libérer les passions. Cependant, même dans cette rébellion, la référence aux classiques reste omniprésente, témoignant de leur statut indéboulonnable. Des auteurs comme Victor Hugo, tout en prônant la liberté artistique, reconnaissaient la grandeur de leurs prédécesseurs. Pour comprendre cette évolution et les ruptures, il est éclairant de se pencher sur la litterature française du 18e siecle et d’explorer la litterature 18eme siecle dans son ensemble.
La Littérature du 17ème Siècle dans la Culture Contemporaine
Aujourd’hui encore, la littérature du 17ème siècle n’a rien perdu de sa pertinence. Ses thèmes universels – le conflit entre le devoir et la passion, l’hypocrisie sociale, la quête de la vérité – continuent de résonner. Les pièces de Molière sont régulièrement jouées et adaptées, leurs répliques devenant des expressions proverbiales. Les tragédies de Racine fascinent par leur intensité psychologique et la perfection de leur versification. Les Pensées de Pascal demeurent une source inépuisable de réflexion philosophique et spirituelle.
Le Classicisme nous enseigne la valeur de la rigueur, de la précision et de l’élégance. Il nous rappelle que la forme n’est pas un simple ornement, mais le véhicule essentiel d’un sens profond. Il forge notre sensibilité au beau, au vrai et à la justesse de l’expression, des qualités précieuses dans notre monde actuel.
Questions Fréquentes sur la Littérature du 17ème Siècle
Voici quelques interrogations courantes qui permettent d’éclaircir les aspects clés de cette période littéraire fondamentale.
Quels sont les principaux auteurs de la littérature du 17ème siècle?
Les figures emblématiques de la littérature du 17ème siècle incluent Pierre Corneille, Jean Racine, Molière pour le théâtre, Blaise Pascal et La Rochefoucauld pour la prose morale, ainsi que Jean de La Fontaine pour ses fables. Madame de La Fayette a également marqué le roman. Ces auteurs ont chacun marqué leur domaine par leur génie et leur contribution au classicisme français.
Pourquoi le 17ème siècle est-il considéré comme le “Grand Siècle” de la littérature française ?
Le 17ème siècle est appelé le “Grand Siècle” en raison de l’exceptionnelle floraison artistique et littéraire qui a eu lieu sous le règne de Louis XIV. Cette période a vu l’émergence du Classicisme, caractérisé par une recherche d’ordre, de raison et de perfection formelle, produisant des chefs-d’œuvre intemporels dans tous les genres littéraires.
Quel rôle la Cour du Roi Louis XIV a-t-elle joué dans le développement de la littérature du 17ème siècle ?
La Cour de Louis XIV, notamment à Versailles, a joué un rôle central. Elle a servi de mécène pour de nombreux écrivains, de cadre pour leurs créations (notamment le théâtre), et de sujet d’observation pour la critique sociale. La culture de la Cour a influencé les thèmes et le style, prônant l’élégance et la maîtrise.
Comment le mouvement janséniste a-t-il influencé les écrivains du 17ème siècle ?
Le jansénisme, mouvement religieux rigoriste, a profondément influencé certains écrivains par sa vision pessimiste de la nature humaine et son insistance sur la grâce divine. Il a nourri des réflexions sur le destin, la volonté et la foi, notamment chez Blaise Pascal et Jean Racine, conférant une dimension morale et métaphysique à leurs œuvres.
En quoi la pièce “Phèdre” de Racine est-elle représentative de la tragédie classique ?
“Phèdre” est emblématique de la tragédie classique par sa soumission aux règles des trois unités (temps, lieu, action), la grandeur de son alexandrin, et son exploration intense des passions humaines. Elle dépeint des personnages nobles confrontés à une fatalité inéluctable, avec une analyse psychologique profonde de l’amour, de la culpabilité et du destin.
Conclusion
La littérature du 17ème siècle n’est pas un simple chapitre de l’histoire, mais une bibliothèque vivante où chaque volume, chaque vers, chaque maxime résonne avec une actualité étonnante. Elle nous convie à une réflexion perpétuelle sur la nature humaine, la société et les grands dilemmes de l’existence. Son héritage stylistique, sa profondeur psychologique et sa quête de l’universel en font une source d’inspiration inépuisable. Que ce soit à travers les rires libérateurs de Molière, les tourments sublimes de Racine ou les méditations abyssales de Pascal, la littérature du 17ème siècle nous offre une leçon d’humanité et d’esthétique dont la richesse ne cesse de nous émerveiller et de nous éclairer. Continuons de la célébrer, car en elle réside une part essentielle de l’âme française.

